Entre les Chasseurs et la Nature : une Interview avec les Manchester Hunt Sabs

Voici une interview des Manchester Hunt Sabs (activistes contre la chasse) publiée initialement (en anglais) sur Because we Must, site basé en Amérique du Nord qui partage des infos sur l’activisme pour la libération humaine, animale et de la terre. Signalons au passage que la Hunt Saboteurs Association du Royaume Uni, réseau auquel les Manchester Hunt Sabs sont rattaché-e-s, vient de rejoindre l’Anti-Fascist Network (Réseau Antifasciste) : http://antifascistnetwork.wordpress.com.

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Nous sommes heureuses/x de partager avec tout le monde une interview avec les Manchester Hunt Sabs (Saboteurs/euses de chasse de Manchester) ! Dans le contexte d’une opposition croissante aux chasses en Amérique du Nord autour des abattages sélectifs décidés par les gouvernements, et l’augmentation récente des chasses organisées, ils ont parlé avec nous afin de partager quelques astuces et informations sur le sabotage de chasse, et sur les moyens à la disposition des gens pour défendre la nature près de chez elles/eux !

Because We Must : Est ce que vous pouvez expliquer brièvement en quoi consistent les sabotages de chasse pour les personnes qui ne sont pas forcément familières de votre travail, et pourquoi vous vous êtes impliqué-e-s dans ce type d’action spécifique dans votre région ?

Manchester Hunt Sabs : Le Sabotage de Chasse est une forme d’action directe née au Royaume Uni il y a 50 ans. Le principe de base est de perturber une chasse (au renard, au cerf, au lièvre, au lapin) en rendant difficile, voire impossible aux chasseurs/euses d’opérer. Généralement, la plupart des sabotages ont lieu contre des chasses qui utilisent des meutes de chiens. Il s’agit principalement, mais pas toujours, de chasses à courre (à cheval).

BWM : A quelle fréquence sortez vous pour faire ce genre d’actions ? Est-ce que ça dépend de certains critères, ou est-ce que vous vous opposez à toutes les chasses dans votre région ?

MHS : Beaucoup de saboteuses/eurs travaillent et c’est une contrainte avec laquelle il nous faut composer, mais ça se passe pendant la période de chasse (de fin août à mars dans la plupart des endroits) et plutôt les week-ends, même s’il y a aussi régulièrement des actions en semaine lorsqu’on est assez nombreux/ses.

huntsabs1BWM : Depuis combien de temps est-ce que votre groupe, ou des individus dans votre groupe, s’impliquent dans ce genre d’action directe pour les animaux ?

MHS : Personnellement je fais ça depuis bientôt 20 ans, avec des interruptions. A un moment donné c’est une forme d’action qui semblait être sur le déclin, étant donné que la plupart des gens impliqué-e-s commençaient à prendre de l’âge ! De nombreux modes de chasse ont été interdits au Royaume Uni en 2005 et beaucoup de gens ont laissé tomber la lutte à ce moment là car ils/elles avaient l’impression que notre tâche était terminée. Mais au fil des années, il est devenu évident que cette interdiction est largement ignorée par les chasseuses/eurs.

Depuis à peu près cinq ans une nouvelle génération de personnes s’est mise à s’impliquer dans la lutte à mesure qu’elle prenait connaissance de cette réalité, et il y a une véritable résurgence du nombre de groupes par ici. Il y a probablement plus de groupes actifs aujourd’hui que n’importe quand dans les vingt dernières années.

BWM : En Amérique du Nord nous n’avons pas de chasses organisées du même type que celles qui se font au Royaume Uni, mais il y a des battues sélectives, et des tueries d’animaux sauvages organisées par le gouvernement dans des zones précises à un moment donné. Ici les gens commencent à s’organiser autour de ces chasses et à les perturber. Est-ce qu’il y a des conseils ou des enseignements que vous voudriez partager avec les gens qui essaient de s’organiser contre une chasse autorisée par la loi en Amérique du Nord ?

MHS : C’est très difficile de donner des conseils, sachant que votre législation et votre culture de la chasse diffèrent énormément des nôtres. Soyez adaptables, prudent-e-s et ne vous faites pas prendre ! Tirez avantage des médias sociaux pour contourner les médias dominants et faire passer votre message. Ne sous-estimez pas les possibilités d’action d’un petit nombre de personnes organisées.

BWM : Est-ce que vous pouvez nous faire partager certaines victoires ou succès remportés par le passé par votre groupe, ou par des saboteuses/eurs de chasse avec qui vous avez travaillé ?

MHS :
Chaque fois qu’on apprend qu’un-e animal-e échappe à des chasseurs/euses c’est une victoire. Les Saboteurs/euses de chasse (parmi d’autres groupes engagés dans des campagnes) ont été largement accusé-e-s d’avoir provoqué « l’échec » de la première étape de l’élimination des blaireaux dans deux zones du Royaume Uni en 2013. Définitivement on considère ça comme une victoire, car même si l’élimination continue elle a couté beaucoup plus cher que prévu, et les résultats sont bien en-deçà des objectifs annoncés.

BWM : Est-ce que vous avez l’impression qu’il y a des enseignements ou des leçons que vous avez appris en faisant ça qui pourraient s’appliquer de manière plus large au sein des mouvements de libération animale, ou peut-être dans d’autres formes de résistance ou d’activisme ?

huntsabs3-248x139MHS : Ça varie en fonction des groupes, et des causes qu’ils défendent. J’ose espérer que nous, les Manchester Sabs, nous sommes vu-e-s comme des gens plutôt clairs politiquement et terre à terre. On essaie d’être ouvert à de nouveaux/lles membres mais on n’accepte pas de racistes, d’homophobes ou de sexistes. Il faut accepter le fait que tout le monde n’ira pas aussi loin que soi, que chacun-e a des limites à l’engagement qu’elle/il peut fournir, et que ceux/celles qui vont moins loin que d’autres ont toujours des contributions importantes à apporter à ce qu’on fait.

BWM : Comment est-ce que les gens, au sein et en-dehors des mouvements de libération animale, réagissent à ce genre d’activités ? Est-ce que vous trouvez que vous êtes soutenu-e-s comme il faut dans ce que vous faites, ou est-ce que c’est vraiment aux individu-e-s impliqué-e-s de prendre ça à cœur sans attendre de retour ?

MHS :
On bénéficie d’un bon soutien. Le sabotage de chasse est généralement vu comme l’avant garde de l’action directe au Royaume Uni. On n’est pas un groupe qui mène une campagne, on est la dernière ligne de défense pour les animaux victimes de la chasse. Il y a une perception historique, créée par la presse et les pro-chasse, qui ne reflète pas les sabotages d’aujourd’hui et qui rend parfois les gens « normaux » méfiant-e-s vis-à-vis de nous. Notre travail contre l’élimination des blaireaux nous a mis en contact avec beaucoup de ces gens, et je pense a élargi non seulement le soutien qu’on reçoit, mais aussi le type de personnes qui nous rejoint.

BWM : Est-ce qu’il y a quoi que ce soit que des individu-e-s peuvent faire pour aider à soutenir votre groupe ou vos efforts à distance ?

MHS : Oui. Les dons sont toujours bienvenus ! Suivez ce qu’on fait en ligne, en particulier par touiteur et Fessebouc. Il y a de plus en plus d’actions menées sur les médias sociaux qui peuvent aider à ce qu’on fait sur le terrain.

BWM : Si vous aviez la possibilité de dire une chose aux gens qui chassent des animaux pour le sport ou pour leur propre plaisir, qu’est-ce que ce serait ?

MHS : C’est une question difficile. On n’est pas là pour débattre avec elles/eux ou les faire changer d’avis, ce n’est pas ce qu’on fait. C’est difficile pour moi de comprendre leur manière de raisonner. Mais ce qui me viendrait à l’esprit, c’est probablement « Grandissez et trouvez vous un loisir convenable – on est en 2014, votre époque et l’époque de votre « sport » sont révolues ».

BWM : Est-ce que vous avez un mot de la fin avec lequel vous voudriez nous quitter, pour les personnes qui pourraient envisager de s’impliquer dans le sabotage de chasse, ou de s’organiser contre les chasses et les battues près de chez elles/eux ?

MHS : Tous les gens dans notre équipe ont atterri là en suivant des chemins différents et pour des raisons différentes. Tout le monde a une première fois et la plupart des gens ne connaissent personne quand ils arrivent chez nous. Le sabotage peut être une expérience effrayante, amusante, hilarante ou ennuyeuse. Mais quand tu vois ton premier renard ou ton premier lièvre s’enfuir d’une chasse grâce à quelque chose que tu as fait… c’est dur de ne pas foncer dedans tête baissée.

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Pour suivre le travail des Manchester Hunt Sabs :
http://www.nwhsa.org.uk
http://www.[fessebouc].com/ManchesterHuntSabs