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Quand un militant de la protection animale tue un militant antispéciste

Le 5 juin dernier un militant antispéciste, et par conséquence également antifasciste et opposé à toutes formes de discrimination, Clément Méric est mort suite au coup donné par Esteban Morillo.

Le groupe de personnes qui a tué Clément comptait dans ses rangs deux fascistes proches du groupe 3eme voie et des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires (JNR), Esteban Morillo et sa copine Katia Veloso. Nous avions déjà prévenu les militants parisiens de la montée des groupes d’extrême droites, lors de la marche contre la fourrure, de la présence d’une banderole tenue par une dizaine de nationalistes lié-e-s aux JNR (groupe aujourd’hui dissous), dont ces deux personnes. Ceux/celles-ci évoluent dans Section Défense Animale, un groupe fasciste de protection animale.

Section défense animale lors de la manif anti fourrure de novembre 2012 à Paris

Ainsi, dans un contexte de montée croissante du fascisme, de l’homophobie et des agressions violentes, nous sonnions déjà la sonnette d’alarme. A différentes reprises, nous avons montré notre fermeté anti fasciste face à la présence de nationalistes et de slogans spécistes, racistes et sexistes dans les manifestations récentes. Nous avons notamment été présent-e-s lors de la manifestation d’Emagny contre un élevage de visons, dans un cortège où nous avons repéré différent-e-s membres de ces organisations fascistes, et avons été verbalement agressé-e-s et menacé-e-s.

La présence de militant-es aux idées nationalistes dans les milieux de la protection animale n’est malheureusement pas une nouveauté, en témoigne notamment la Fondation Brigitte Bardot et ses cadres dirigeant-e-s, responsables par exemple ces dernières années d’une campagne au racisme dissimulé dirigée exclusivement contre les abattages rituels juifs et musulmans.

Cette campagne, comme cette présence de fascistes dans des manifs contre la fourrure, n’a suscité que peu de réactions au sein des mouvements pour les animaux. Quand le sujet est abordé, on se voit souvent répondre que les positions de ces personnes importent peu, que la meilleure manière d’agir pour les animaux est de rester uni-e-s dans la lutte en leur faveur et de mettre de côté les divergences politiques de chacun-e. Le combat pour les animaux serait un combat apolitique, que l’urgence ferait primer sur tout le reste.

Ce refus de voir la politique « salir » le mouvement animaliste révèle pourtant un point de vue sur la question animale que nous ne partageons absolument pas. Pour nous qui nous réclamons non pas de la protection animale mais de l’antispécisme, il s’agit bel et bien d’une question politique. Les animaux non-humains ne sont pas des victimes angéliques et innocentes auxquels il faudrait accorder notre charité ; ils sont des êtres vivants, sentients, qui subissent une oppression de la part des humain-e-s et ont besoin pour leur bonheur de s’en libérer, avec l’aide que nous, depuis notre position privilégiée de dominant-e-s, pouvons leur apporter. De même, la mort de Clément n’est pas qu’un drame interpersonnel accidentel, mais bel et bien le résultat d’un conflit entre deux visions politiques radicalement opposées : l’une luttant pour l’émancipation de tout-e-s, et l’autre pour celle d’une supposée élite nationale à travers l’exclusion de tout-e-s celles/ceux qui n’en feraient pas partie.

Pour nous, les dominations que constituent le spécisme, le capitalisme, le fascisme, le sexisme, l’âgisme ou le validisme sont intimement liées. Elles provoquent des souffrances comparables sur des milliards d’animaux humains et non-humains et fonctionnent selon des processus très semblables. La lutte contre l’oppression des animaux ne nous paraît ni plus ni moins importante que toutes les autres. Déclarer qu’elle serait prioritaire sur la lutte contre le fascisme et le nationalisme, ce que font nombre de militant-e-s et d’organisations de protection animale en acceptant des gens qui s’en réclament dans les luttes qu’ils/elles mènent, est un non-sens ; ça revient à lutter contre une oppression en en cautionnant une autre.

Et pourtant, lorsque nous dénonçons cette montée du fascisme, on nous accuse de mettre de l’huile sur le feu.

Tolérer la présence du fascisme conduit à ce genre de drame.

Il devient vital, au jour où un militant de la Protection Animale a tué un végan antifasciste, de prendre position, et de clarifier une bonne fois pour toutes la situation.

Je n’ai pas réagi aux discours racistes de la fondation Brigitte Bardot

Je n’ai pas réagi quand Brigitte Bardot a appelé à voter pour l’extrême droite.

Je n’ai pas réagi lorsque des militant-e-s fascistes ont battu le pavé lors la Marche contre la fourrure (1)

J’ai craché sur tous les militants antispécistes qui s’opposent au fascisme.

Et maintenant, qui va réagir lorsqu’on tue un antispéciste pour ses convictions politiques ?

Il n’est jamais trop tard pour prendre position, nous devons tou-te-s nous rendre compte que les idées fascistes tuent. Pour la construction d’un mouvement stable, nous devons nous unir derrière l’antispécisme, être cohérent et faire front à toutes les dominations et discriminations.

Pour nous, l’émancipation des animaux ne pourra pas se passer de celle des humain-e-s, et vice versa.

(1) voire article plus ancien